“En Transit”-Episode 7
… qu’il est encore loin le temps des câlins.
9 mai 2020 – cinquante-quatrième jour de confinement

 

jour J moins 2

“Les câlins, mieux que l’esperanto, parlent une langue universelle.” Kathleen Keating
Je n’avais pas mesuré leur puissance.

Mais maintenant je mesure leur absence et … leur importance.

Le manque est viscéral, il enfle, m’envahit. Un manque qui risque de durer un certain temps. Pas pour demain, les bras qui se referment sur vous, consolants, apaisants, les amitiés que l’on célèbre, les hugs/câlins, yeux clos, larmes pas loin, les retrouvailles avec mes fils, confinés ailleurs, les amants séparés qui s’étreignent en un fondu enchaîné … Rappelez-vous le générique de fin du cultissime film Love Actually, où, dans l’aéroport d’Heathrow, le monde entier s’embrasse, s’étreint, se cajole, se console en un kaléidoscope géant sur le God only knows des Beach Boys …

Clap de fin.

A partir du 11 mai, on garde ses distances.

On respecte les gestes barrières.

Loin de la peau. Notre premier lien avec l’autre. Cet élan de spontanéité qui jaillit du cœur et va droit au cœur. Tout ce qui nous a construit depuis la naissance. Un nouveau-né, même bien nourri, ne survit pas au manque prolongé du contact peau à peau. Adulte, le manque s’en fait sentir tout autant : on peut connaître l’angoisse de vivre sans l’hormone de l’attachement, l’ocytocine, qui se développe par le fait du contact d’humain à humain et contribue à diminuer les effets du stress. Pour la neuropsychologue Céline Rivière, auteur de la Câlinothérapie (éditions Michalon) : ne pas toucher et ne pas être touché fait souffrir et dans cette période de déconfinement qui se profile, il va nous falloir freiner notre élan naturel pour ne pas contaminer l’autre. Les répercussions psychiques peuvent être très importantes : car, moins on est touché, moins on se sent en sécurité, ce qui peut avoir pour conséquence de majorer les phobies sociales. Les gens peuvent finir par avoir peur de toucher l’autre, potentiellement porteur de mort.

L’indienne Amma a intégré depuis longtemps dans son quotidien l’importance des câlins et fait du darshan, sa marque de fabrique. Depuis 25 ans, elle étreint qui le demande, à raison… d’un million de personnes par an.

En revanche, une chose, désormais prohibée dans l’espace public, ne me manquera en aucune façon : la coutume si vide de sens des bises à tout va, à ceux que l’on ne connaît même pas, que l’on croise dans les bureaux, les réunions, les stages. Une, deux ou pire trois… C’est rabaisser le geste à une banalité confondante. Car embrasser quelqu’un, et non cette bise que l’on claque -déjà rien que ce verbe employé devrait nous mettre la puce à l’oreille- n’est pas un geste anodin. C’est une façon de montrer à quelqu’un qu’il compte dans notre vie, qu’on lui accorde une place à part et qu’on ne lui signifie pas simplement un « bonjour » désinvolte, sans y prêter attention.

Ou alors c’est gâcher la marchandise.

Recette de La Pavlova

Recette

Pour une consolation en ces temps de disette épidermique

INGRÉDIENTS

  • 6 blancs d’œufs
  • 340 gr de sucre
  • 1,5 c à café de vinaigre
  • Crème fraîche liquide à mettre au frais avant de la fouetter
  • Des fraises… ou tout autre fruit rouge de saison.

 

Bien sûr, on peut se compliquer la vie, battre les blancs en neige, avec le sucre jusqu’à ce qu’ils forment un bec d’oiseau, leur ajouter une goutte de vinaigre pour la brillance, faire cuire la meringue à feu tout doux à 130° pendant une heure… mais on peut aussi simplifier le tout : acheter une grosse meringue toute prête chez le boulanger du quartier, la badigeonner généreusement de crème préalablement fouettée et la décorer de fraises ou de toute autre cueillette… Sublime !

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